Chroniques
LA PLUME DU FAUCON
Vous trouverez ici plusieurs articles traitant principalement des tendances sociales reliées à la vie de couple. M. Leblanc est chroniqueur pour divers journaux et magazines et son style d’écriture a beaucoup fait parler de lui. Sujets chauds, saupoudrés d’humour, il aura bonne plume pour chacun des lecteurs.
Ils ne mangent pas chez St-Hubert, mais chez Toqué!. Ils ne magasinent pas chez Simons, mais chez Holt Renfrew. Ils ne roulent pas en Toyota, mais en BMW.
Les riches peuvent se payer des luxes que la classe moyenne n'a pas les moyens d'avoir. Mais exhiber du luxe n'est pas nécessairement synonyme de richesse.
«On juge souvent les gens selon ce qu'ils ont», souligne Benoît Duguay, professeur à l'École des sciences de la gestion de l'UQAM et auteur du livre Consommation et luxe, la voie de l'excès et de l'illusion. Mais attention. «On peut penser qu'une personne est très riche parce qu'elle dépense beaucoup et qu'elle a beaucoup de signes de richesse. Elle peut avoir deux Mercedes dans la cour et une grosse maison, mais peut-être qu'elle ne dort pas la nuit parce qu'elle est criblée de dettes.»
Reste qu'il y a plus de riches qui veulent montrer leurs objets luxueux que de riches qui veulent les cacher. «La richesse discrète ou à la dérobée, c'est plus rare», souligne M. Duguay.
En matière de tendances et de mode, Holt Renfrew est sans doute le symbole ultime du luxe à Montréal. Riches, les clients de Holt Renfrew? Pas nécessairement, répond la directrice des communications, Jozée Desrosiers: «Avant de parler de revenus, je dirais que ce sont des consommateurs qui veulent quelque chose de différent, d'exclusif. Ils cherchent le raffinement.»
Mais Holt Renfrew est l'un des rares magasins à Montréal où des clients peuvent dépenser plus d'un million de dollars par année. «Holt», comme l'appellent ses habitués, fait tout pour dorloter ses clients.
Trois stylistes personnels travaillent au service de shopping personnalisé. Leurs services sont gratuits! Trois employés travaillent également au service de conciergerie. «Plus la demande est difficile, plus on aime ça», indique l'un d'eux, Jean-Pierre Chavez. Le dernier tour de force de son équipe: dénicher six billets pour le concert de Led Zeppelin à Londres - service de gardiennage inclus -, pour un total de 6000$.
Les demandes des clients sont parfois singulières, voire princières. Comme piloter un bolide de Formule1 et faire fermer le Kremlin de Moscou pour le visiter. Le service de conciergerie a même une entente avec une clinique médicale privée de Montréal. Comme pour le service de shopping personnalisé, il n'y a pas de frais supplémentaires.
Acheter du temps
Quand elle voit les clients qui entrent aujourd'hui chez Holt Renfrew, Jozée Desrosiers constate que le luxe s'est beaucoup démocratisé.
C'est aussi ce qu'on remarque dans le domaine de l'automobile. «Il y a 10 ans, les voitures haut de gamme n'étaient pas aussi accessibles, note Michel Lauzon, concessionnaire Porsche, Audi et Volks de Laval. Les BMW, Mercedes et Audi ont mis sur le marché des modèles qui coûtent de 35 000$ à 50 000$.»
L'idée est de rejoindre le public des jeunes adultes. «C'est important, le statut que procure une voiture, souligne M. Lauzon. C'est aussi parce que, après, on en veut toujours plus. On veut passer au modèle de 50 000$.»
Selon Jozée Desrosiers, la marchandise ne suffit plus. Le luxe se vit de plus en plus au plan du service. «La marchandise devient de plus en plus accessible. Les marques Dior, Prada, Vuitton, ce n'est plus suffisant. Le luxe ne se fait pas tant du côté du produit que du service.»
Engager du personnel
Payer pour un service, c'est payer pour gagner du temps. De plus en plus, les gens aisés engagent du personnel. Ils payent des gardiennes à temps plein, des jardiniers ou encore des promeneurs de chien. «C'est une nouvelle tendance», indique Diane-Gabrielle Tremblay, spécialiste en conciliation travail-famille et professeure affiliée à la TELUQ.
À Montréal, par exemple, Karen et Paula Quinn offrent des services d'«assistantes personnelles». Leurs clients sont-ils riches? Encore là, les deux soeurs affirment que ce n'est pas une question d'argent. Leurs clients achètent du temps, plaident-elles. À quel prix? Quarante dollars l'heure.
Pour engager une assistante, un traiteur, un jardinier ou un entraîneur privé, il faut avoir les moyens, rappelle Mme Tremblay. «C'est un luxe de faire faire ses tâches par d'autres personnes, d'acheter du temps.»
Pour certains, c'est aussi une question d'image et de statut. Depuis que les produits luxueux se sont démocratisés, avoir sa propre styliste ou une nounou est devenu une nouvelle façon d'exhiber sa richesse. «On va chercher d'autres manières de se démarquer», explique Mme Tremblay. «Il y a des femmes à la maison qui se voient de classe supérieure et qui ne veulent pas s'abaisser à faire certaines tâches», ajoute l'universitaire.
Mais ce n'est pas la norme. La plupart des couples qui paient pour des services travaillent beaucoup et sont débordés. Diane-Gabrielle Tremblay dit à ces parents de ne pas oublier de faire participer leurs enfants à certaines tâches quotidiennes, comme à la préparation des repas, par exemple. «Il ne faut pas négliger la transmission des connaissances.»
C'est aussi une question d'attention et d'attachement. «Je détesterais donner à ma fille un cadeau que je n'ai pas acheté moi-même. C'est dépersonnalisant», conclut la spécialiste en conciliation travail-famille.
Par: Émilie Côté
Sur: www.lapresse.ca
Les riches peuvent se payer des luxes que la classe moyenne n'a pas les moyens d'avoir. Mais exhiber du luxe n'est pas nécessairement synonyme de richesse.
«On juge souvent les gens selon ce qu'ils ont», souligne Benoît Duguay, professeur à l'École des sciences de la gestion de l'UQAM et auteur du livre Consommation et luxe, la voie de l'excès et de l'illusion. Mais attention. «On peut penser qu'une personne est très riche parce qu'elle dépense beaucoup et qu'elle a beaucoup de signes de richesse. Elle peut avoir deux Mercedes dans la cour et une grosse maison, mais peut-être qu'elle ne dort pas la nuit parce qu'elle est criblée de dettes.»
Reste qu'il y a plus de riches qui veulent montrer leurs objets luxueux que de riches qui veulent les cacher. «La richesse discrète ou à la dérobée, c'est plus rare», souligne M. Duguay.
En matière de tendances et de mode, Holt Renfrew est sans doute le symbole ultime du luxe à Montréal. Riches, les clients de Holt Renfrew? Pas nécessairement, répond la directrice des communications, Jozée Desrosiers: «Avant de parler de revenus, je dirais que ce sont des consommateurs qui veulent quelque chose de différent, d'exclusif. Ils cherchent le raffinement.»
Mais Holt Renfrew est l'un des rares magasins à Montréal où des clients peuvent dépenser plus d'un million de dollars par année. «Holt», comme l'appellent ses habitués, fait tout pour dorloter ses clients.
Trois stylistes personnels travaillent au service de shopping personnalisé. Leurs services sont gratuits! Trois employés travaillent également au service de conciergerie. «Plus la demande est difficile, plus on aime ça», indique l'un d'eux, Jean-Pierre Chavez. Le dernier tour de force de son équipe: dénicher six billets pour le concert de Led Zeppelin à Londres - service de gardiennage inclus -, pour un total de 6000$.
Les demandes des clients sont parfois singulières, voire princières. Comme piloter un bolide de Formule1 et faire fermer le Kremlin de Moscou pour le visiter. Le service de conciergerie a même une entente avec une clinique médicale privée de Montréal. Comme pour le service de shopping personnalisé, il n'y a pas de frais supplémentaires.
Acheter du temps
Quand elle voit les clients qui entrent aujourd'hui chez Holt Renfrew, Jozée Desrosiers constate que le luxe s'est beaucoup démocratisé.
C'est aussi ce qu'on remarque dans le domaine de l'automobile. «Il y a 10 ans, les voitures haut de gamme n'étaient pas aussi accessibles, note Michel Lauzon, concessionnaire Porsche, Audi et Volks de Laval. Les BMW, Mercedes et Audi ont mis sur le marché des modèles qui coûtent de 35 000$ à 50 000$.»
L'idée est de rejoindre le public des jeunes adultes. «C'est important, le statut que procure une voiture, souligne M. Lauzon. C'est aussi parce que, après, on en veut toujours plus. On veut passer au modèle de 50 000$.»
Selon Jozée Desrosiers, la marchandise ne suffit plus. Le luxe se vit de plus en plus au plan du service. «La marchandise devient de plus en plus accessible. Les marques Dior, Prada, Vuitton, ce n'est plus suffisant. Le luxe ne se fait pas tant du côté du produit que du service.»
Engager du personnel
Payer pour un service, c'est payer pour gagner du temps. De plus en plus, les gens aisés engagent du personnel. Ils payent des gardiennes à temps plein, des jardiniers ou encore des promeneurs de chien. «C'est une nouvelle tendance», indique Diane-Gabrielle Tremblay, spécialiste en conciliation travail-famille et professeure affiliée à la TELUQ.
À Montréal, par exemple, Karen et Paula Quinn offrent des services d'«assistantes personnelles». Leurs clients sont-ils riches? Encore là, les deux soeurs affirment que ce n'est pas une question d'argent. Leurs clients achètent du temps, plaident-elles. À quel prix? Quarante dollars l'heure.
Pour engager une assistante, un traiteur, un jardinier ou un entraîneur privé, il faut avoir les moyens, rappelle Mme Tremblay. «C'est un luxe de faire faire ses tâches par d'autres personnes, d'acheter du temps.»
Pour certains, c'est aussi une question d'image et de statut. Depuis que les produits luxueux se sont démocratisés, avoir sa propre styliste ou une nounou est devenu une nouvelle façon d'exhiber sa richesse. «On va chercher d'autres manières de se démarquer», explique Mme Tremblay. «Il y a des femmes à la maison qui se voient de classe supérieure et qui ne veulent pas s'abaisser à faire certaines tâches», ajoute l'universitaire.
Mais ce n'est pas la norme. La plupart des couples qui paient pour des services travaillent beaucoup et sont débordés. Diane-Gabrielle Tremblay dit à ces parents de ne pas oublier de faire participer leurs enfants à certaines tâches quotidiennes, comme à la préparation des repas, par exemple. «Il ne faut pas négliger la transmission des connaissances.»
C'est aussi une question d'attention et d'attachement. «Je détesterais donner à ma fille un cadeau que je n'ai pas acheté moi-même. C'est dépersonnalisant», conclut la spécialiste en conciliation travail-famille.
Par: Émilie Côté
Sur: www.lapresse.ca